Marais Wiels Communiqué Beliris Participation en question et programme indigeste

Communiqué 10 juillet
Il y a 1 mois jour pour jour, le 10 juin 2023, s’est terminé le « processus de participation » dans le cadre du projet d’aménagement de « nouveaux espaces publics autour du Marais Wiels » dont le maître d’ouvrage est Beliris.
Cette opération a lieu dans le cadre du Contrat de Rénovation Urbaine 4 « Avenue du Roi » lancé en 2017 dont la mise en œuvre devra être finalisée mi-2025.
La demande de permis d’urbanisme pour ces aménagements concerne :
En tranche ferme : aménagement du parc Wielemans – Van Volxem.
En tranches conditionnelles : la voie cyclo-piétonne le long de la voie ferrée et percement d’un passage dans la bute de chemin de fer (entre Brass et Divercity).
On vous l’annonce tout de go, ce dernier projet ne se fera pas (mais qui y avait cru ?).
Qui dit permis, dit désormais « timing » et le timing a son importance :
« ON EST POUSSÉ PAR LE TEMPS ». Sacré planning prévisionnel ! L’année électorale approche, vite vite il faut avancer…
C’est en effet déjà à la rentrée de septembre 2023, soit dans 2 mois, que doit être introduite la demande de permis d’urbanisme.
Concernant les saucissonnages des différents projets et l’assèchement du Marais pour constructions, nous vous renvoyons à notre communiqué précédent.
Précisons par ailleurs que le cahier des charges a été réalisé sans consultation des citoyens.
Il y a bien eu une consultation préalable lors du Master Plan Forest-sur-Senne (en 2020 avant l’achat du site du Marais Wiels par la Région) mais il semble que les avis des citoyen.ne.s n’ont pas été pris en compte ou n’a pas été demandé puisque l’extension du Brass, l’aménagement des gradins et de la structure d’entrée n’étaient pas soumis à avis et puisque la piste cyclable était préférée « hors site – avenue Van Volxem » par les participant.e.s, dans le cadre d’un aménagement Bruxelles-Mobilité prévu pour 2030.
Cette vision s’opposait à celle de l’échevinat de la revitalisation urbaine et de la planification urbaine, qui, coûte que coûte, tient à son « parc linéaire des 2 Rives » longeant sur 2,4 km les voies de chemins de fer où tout reste à faire.
Un RER cycliste inter- régional reliant la gare du Midi à Drogenbos et longeant les voies ferrées est par ailleurs depuis longtemps dans les cartons. L’extension de la mission Beliris initialement prévue pour le terrain entre le WIELS et le Brass et derrière le Brass s’est révélée être une belle opportunité pour financer la cyclostrade à l’arrière du Marais Wiels.
Mais revenons à la dernière séance annoncée comme participative et présentée comme une « co-construction ».
Celle-ci a laissé les habitant.e.s/participant.e.s bien déçu.e.s et perplexes : il s’agissait en réalité d’une présentation in situ de l’avant-projet succinct.
Si le bureau VVV (en charge de la conception du futur parc) semble bien avoir assimilé et transmis les remarques et suggestions citoyennes du troisième atelier (en gros, les seules 3 heures réellement participatives), il fut ressenti par l’ensemble des répondant.es que les négociations et/voire accords, se passaient en dehors de ce cadre.
En effet, il existe un « Comité d’accompagnement » (dont les décisions ne peuvent néanmoins pas remplacer celles du maître d’ouvrage, Beliris) dont le/la citoyen.ne est exclu.e.
Ce comité d’accompagnement comprend des délégués de Beliris, de la Région de Bruxelles-Capitale et d’autres instances désignées par Beliris, à savoir la Commune de Forest, Bruxelles Environnement, Urban.brussels (anciennement Bruxelles Urbanisme et Patrimoine), le Bouwmeester, et des représentants du WIELS et du Brass, …
En excluant le.la citoyen.ne et les petites associations, ces réunions ne devancent-elles pas la réunion de commission de concertation liée à l’enquête publique concernant la demande de permis d’urbanisme ?
Cela pose questions…
On se sent en droit de se demander également pourquoi le Brass et le WIELS, institutions culturelles, sont invitées à cette table et ne sont pas présentes aux « ateliers participatifs » avec habitant.e.s et petites associations de quartiers (Maison En Plus, Maison des Jeunes, Miro, …) ?
Perte de temps ? Cela aurait permis pourtant de comprendre les désirs et besoins ou craintes des uns et des autres. Rappelons par ailleurs que le WIELS est une asbl privée occupant un bâtiment appartenant à la Région et liée à celle-ci par un bail emphytéotique.
Manque de clarté et de transparence
Au terme de ce processus, nous voici donc avec de plus grandes inconnues et une complexification des niveaux de responsabilité autour desquelles nous (comme vraisemblablement les architectes) avons dû et devons slalomer !
1. Le Brass et son extension : les plans de construction de l’extension du Brass n’ont jamais été présentés (pourtant un dossier est en cours depuis des années (depuis l’achat du terrain entre le Wiels et le Brass ?) auprès du bureau « Dulière architecture»). Ni son projet d’affectation (brasserie ?), ni l’origine du budget. Vu l’état des finances de la Commune de Forest, il faut s’attendre à un appel de fonds extérieurs (qui risquent de rendre le projet « excessif  » … on connait la chanson !).
Cette extension du bâtiment, classé, qui n’a encore reçu aucun permis et se trouve néanmoins dans le projet VVV entraîne pourtant bien des questions, des conséquences et des nécessités additionnelles (accès livraisons camions, accès du public, bétonnisation, artificialisation des sols, éclairages, taux de fréquentation, affectations…) dont tant les architectes que les participant.e.s aux ateliers devraient avoir connaissance pour amener des remarques constructives et proposer des aménagements ad hoc.
2. Le tunnel sous les trains : une inconnue qui ne l’est plus : le percement sous la voie ferrée ne se fera pas ! (raison financière, qui l’eut cru ?!). Tombe donc à l’eau, la liaison Est-Ouest et le lien entre les quartiers. Cette liaison, précieuse pour les locaux, devient absente et cela est regrettable. Les quartiers Primeurs – Pont de Luttre et Charroi restent enclavés et séparés des quartiers St-Antoine et Orban par la frontière que constitue la butte de chemin de fer. Cette percée aurait remplacé le passage Orban-Luttre que la Commune de Forest a irréversiblement condamné, il reliait pourtant le Marais à Divercity. On est là sur un véritable échec. Le parc, n’est du coup plus traversant comme initialement prévu par la Commune en ligne droite (de Van Volxem à Divercity). Pour se rendre, entre autres, à Divercity ou à l’école De Puzzel ou à l’école El Hikma rue St-Denis, les habitant.e.s du quartiers St-Antoine ou Orban devront donc ressortir par l’avenue Van Volxem entre le WIELS et le Brass. … Ou par la grille du parking WIELS, avenue du Pont de Luttre, … si le WIELS accepte cet usage sur son parking ! Encore une autre belle inconnue !
3. Parking du Wiels : c’est en effet, seul, le WIELS qui a la maîtrise de cet accès. Comme nous l’avions déjà souligné en 2017, lors d’une enquête publique Contrat de Rénovation Urbaine 4 et comme nous l’avons répété lors de la consultation du Master Plan : cet accès par l’avenue du Pont de Luttre n’est pas considéré comme entrée et sortie du parc. Devant notre étonnement quant à l’absence d’avancée à ce sujet, on nous répond : « C’est actuellement en négociations ». Cette entrée/sortie est pourtant prévue dans le projet VVV comme accès des camions de livraison pour le Brass. Et qui dit entrée de camions de livraisons, dit voies de livraison … traversant le futur parc/esplanade déjà traversé.e par la sortie et l’entrée des cyclistes et piétons de la « cyclostrade » à venir … car oui, voici une autre inconnue (et de taille, quel type d’accès pour les 2 roues ?) :
4. La « Cyclostrade » : s’agit-il d’une promenade cyclo-pédestre partagée (on parle désormais de cyclostrade) ou d’un « RER cycliste inter-régional » ? Quelle vision est projetée pour cette mission : à court-terme ou à long terme ou à la belge ? Un peu des 2 ? Une autoroute cycliste transrégionale implique, pour le passage le long du pont de l’avenue du Pont de Luttre, la construction d’une rampe sur une centaine de mètres. Dans le projet VVV, la cyclostrade se retrouve en hauteur, sur une nouvelle butte, avec le déversement de centaines de m3 de terre de remblais. Une rampe d’accès tout du long de la voie de chemin de fer aurait vraisemblablement fait exploser les budgets. Actuellement et pour longtemps encore, cette autoroute/promenade n’a pas de continuité claire au-delà du site.
Pour bien gérer les entrées et sorties, il est primordial de savoir une bonne fois pour toutes de quoi on parle.
S’il ne s’agit pas d’une autoroute mais d’une promenade, alors celle-ci existe déjà, plate, facile, gratuite.
S’il s’agit d’un RER, il ne doit en aucun cas perturber la déambulation pédestre. Le cahier des charges précise bien que les aménagements doivent améliorer la mobilité des modes actifs. Imposer une pente (montante et descendante), de quelque pourcentage soit-elle, lorsqu’il existe un cheminement à plat semble contraire au principe STOP (hiérarchisant les différents modes de transports, ce principe favorise la marche à pied, puis les vélos et la micromobilité active puis les transports publics, etc.).
On nous fait miroiter une promenade cyclo-pédestre calme et gentille. Qu’en sera-t-il en réalité dans quelques années ? Il y a de fortes chances que cela devienne une voie rapide pour cyclistes. Qu’en est-il du projet de Bruxelles-Mobilité où une double piste cyclable est prévue avenue Van Volxem, à l’horizon 2030 ? Quelle place restera-t-il pour le promeneur, pour les visiteurs, pour les écoliers ou élèves qui parfois viennent en nombre ? Quelle place pour le repos et la détente ? Pour la contemplation de la biodiversité et richesse du site ?
A noter que Bruxelles Environnement est déjà intervenu le 04 et 05 juillet afin d’ouvrir la porte nord du marais, effectuer des travaux de terrassement dans certaines alcôves et a déjà dessiné les contours d’une piste cyclable en déversant de la porphyre concassée (roche issue du magma). Cette opération a pour conséquence de faussé un relevé biologique compilant des données relatives à la biodiversité/nature et état des lieux sur le terrain, des habitats naturels et espèces à protéger/ encourager/ contrôler.
5. Les appartements sur l’eau : Last but not least : les immeubles d’appartements Citidev. Eux aussi figurant sur les plans du bureau VVV qui se retrouve à devoir organiser une entrée nord (avenue Van Volxem) en prévoyant des constructions (encore une fois sans permis) nécessitant l’assèchement partiel ou total de la roselière nord. La proposition de VVV, à un horizon de deux-trois ans, est d’y créer un « ponton », une voie piétonne qui permette de contempler la roselière. Nos interlocutrices et interlocuteurs sont gêné-es aux entournures, ne répondent pas ou répondent de façon évasive à nos questions… « Nous ne sommes pas maîtres du futur »… Ou de la futur majorité !
6. Dépollution des sols : quelle est la stratégie pour le site ? Motus.
7. Gestion de l’eau : un des objectifs exigés pour cet aménagement est d’ « optimiser la gestion des eaux pluviales sur le site sur base des conclusions existantes (étude hydrologique préliminaire réalisée), en veillant à assurer un objectif sur le site de perméabilité et de temporisation de ces eaux. ». Toutefois, il semble que la gestion intégrée des eaux pluviales du bassin versant Nord (avenue Wielemans Ceuppens) est toujours à l’ordre du jour. Qu’en est-il alors de l’espace nécessaire (vraisemblablement entre le WIELS et le Brass) à la décantation et à la phytoremédiation de ces eaux ? Ceci aurait un impact considérable sur l’aménagement du parc.
8. Le cadastre : Étude faite par géomètre ? Existe-t-elle ? Calcul de la superficie du plan d’eau ? Motus !
9. Le miel et les abeilles : Le devenir des ruches et leur localisation, on n’en parle pas.
10. Les renouées du Japon : Le bureau en est conscient, mais n’en parle pas et pourtant la présence de nombreuses zones à l’arrière du Brass entraîne, si on désire s’en débarrasser, la nécessité de creuser à 6 mètres de profondeur (dépollution). Ce genre de pollution a déjà arrêté des chantiers. Anticiper cette problématique est absolument nécessaire.
Bref. Beaucoup d’inconnues. Si tout cela avait été éclairci, un réel processus de co-construction aurait été possible mais il faut se caler à la ligne du temps imposée par le cadre du Contrat de Rénovation Urbaine 4 et autres appels de fonds…
Que de temps et d’argent perdus avec ce processus lancé avant la réponse à ces multiples inconnues.
Quant au projet …
Pour la création de l’entrée du parc, le cabinet d’architectes VVV (qui a été à l’écoute des participant.e.s) propose la création d’une pente progressive grâce à l’apport de terre de remblais. Cette pente occupera toute la largeur de l’ouverture entre le Wiels et le Brass. Sans désimperméabilisation vraisemblablement, sans dépollution. Des études (encore à faire) à endroits spécifiques selon le projet doivent révéler la présence ou non d’une dalle de béton sous les potagers anciens et actuels. Dans l’affirmative, des drains seraient percés « pour assurer la gestion intégrée des eaux de pluie ». On se permet d’émettre des doutes sur cette méthode. Un chemin sera créé, en diagonal, menant au Brass (tiens, tiens, vers le Brass ?). La pente de 4% devrait le rendre accessible aux PMR.
La dalle principale en arrière de parcelle, sera laissée sur place et visible (« pour maintenir un aspect friche »), percée de 4 trous pour y planter 4 arbres et y créer 2 noues. Il s’agirait de l’ « esplanade Constance-Ida Ceuppens » permettant la livraison du Brass et l’organisation d’évènements. Ça sent l’hamburguérisation. Et là donc, ni désimperméabisation, ni dépollution ? Peut-être n’est-ce pas nécessaire ?
Quant au nouveau talus en hauteur le long de la voie de chemin de fer, il serait créé par l’apport de tonnes de terres de remblais sur le sol actuellement bétonné et tracé des anciens rails. Sans désimperméabilisation, non plus.
En vrai, les quelques avancées, plantation d’arbres et gestion de l’eau pluviale sur le site, ne semblent pas pensées sur une échelle de quartier mais plutôt sur une impression ornementale. Elles ne nécessitent certainement pas l’investissement attendu.
La butte va inévitablement tuer la dynamique spécifique au street art présente depuis 1989 puisque le mur disparaitra (ainsi que toute trace du passage Orban-Luttre. « Cacher cette erreur que l’on ne veut plus voir »).
Présentée comme une opportunité pour augmenter la biodiversité, il est à parier que ce talus construit dans le précieux maillage vert que constitue le talus de chemin de fer va être fortement impacté. L’éclairage que nécessite par ailleurs une cyclostrade mettra déjà en danger cette riche biodiversité du maillage censé être protégé.
En conclusion,
Le projet répond plus à des besoins régionaux qu’à des besoins locaux.
Depuis 2012 (contrat de quartier Primeurs-Pont de Luttre ) les habitants.e.s réclament des potagers en pleine terre, des espaces de détente, des arbres pour respirer,des bancs pour se poser, une promenade douce, des crèches, une ambitieuse gestion intégrée des eaux et de la désartificialisation du site .
On le sent, Beliris, la Région, le WIELS, le Brass (et la Commune ?) voient dans l’aménagement de ces espaces une opportunité pour une nouvelle centralité qui doit rayonner dans ce quartier destiné depuis 2000 à devenir le quartier des arts.
Il faut un espace pouvant accueillir festivals ou foires, guinguettes ou bars, événements, vernissages, concerts et marchés. Nouvelle fierté, de la rue, cet espace doit être vu. Quitte à balayer la biodiversité (dont celle, précieuse et riche, de la butte de chemin de fer), les potagers pleine terre, les ruches, les dynamiques sociales et artistiques qui existent actuellement, le caractère hybride et non affecté du site et l’équilibre fragile de cet écosystème qui se situe quelque part entre l’urbain et le point chaud de biodiversité.
Quel sens aurait une sauvegarde du Marais Wiels, si ce n’est pas pour préserver ce caractère indéfini de lieu-refuge, où se rencontrent humains et non-humains ? Ce lieu qui nous apprend et qui apprendra aux générations futures, ce que le vivant est capable de reprendre sur une urbanisation excessive.
Un classement de l’ensemble du site nous semble être la seule solution pour garder ce caractère. Non pour le figer. Car nous le constatons avec tristesse : chaque aménagement défigure progressivement ce site exceptionnel. Et au vu de la quantité de projets sur ces petits 2,5 hectares, on ne peut que craindre le pire.
Les fonds régionaux ne devraient-ils pas être affectés à d’autres priorités ? Qu’en est-il du carrefour Wielemans, des traversées piétonnes avenues Van Volxem et Fonsny (Imprimerie et Orban) qui ne sont toujours pas régulières, ni dignes de ce nom) ?
En définitive, l’espace public autour du Marais Wiels existe déjà.
Ce sont, les habitant.es, la luxuriante biodiversité, l’histoire et quelques Fé.e.s qui l’ont fait ! et iels se refusent à le regarder se faire dévorer par la ville…